Gomorra, Roberto Saviano
Résumé : Le lecteur est plongé en immersion dans une fresque
de l’Italie, loin des clichés touristiques et culturels, pour se
retrouver dans l’ombre des cités de pierres blanches napolitaines. Un
endroit où les meurtres, la prostitution et les trafics en tous genres
sont le quotidien d’une population abandonnée à elle-même. Un monde sans
codes, ni lois, où la ligne blanche entre le bien et le mal n’existe
plus… La logique de l'entrepreneuriat criminel et la vision des parrains sont
empreintes d'un ultralibéralisme radical. Les règles sont dictées et
imposées par les affaires, par l'obligation de faire du profit et de
vaincre la concurrence. Le pouvoir absolu de vie ou de mort, lancer un produit, conquérir des
parts de marché, investir dans des secteurs de pointe : tout a un prix,
finir en prison ou mourir. Détenir le pouvoir, dix ans, un an, une
heure, peu importe la durée : mais vivre, commander pour de bon, voilà
ce qui compte. Vaincre dans l'arène du marché et pouvoir fixer le
soleil. Gomorra (vous aurez saisi le jeu de mot entre Gomorre et la Camorra, qui en dit long sur l'état de la région) explore Naples et la Campanie dominées par la
criminalité organisée.
Quatrième de couverture : Dans l'empire de la Camorra,
Naples et la Campanie sont dominées par la criminalité organisée - la Camorra - sur fond de guerre entre clans rivaux et de trafics en tout
genre : contrefaçon, armes, drogues et déchets toxiques. C'est ainsi que
le Système, comme le désignent ses affiliés, accroît ses profits,
conforte sa toute-puissance et se pose en avant-garde criminelle de
l'économie mondialisée. Roberto Saviano, au péril de sa vie, a choisi
l'écriture pour mener son combat contre la Camorra. Il met au jour les
structures économiques et territoriales de cette mafia surpuissante.
Mon avis : Je ne m'attendais vraiment pas à ça. Après tout le tapage autour de ce livre, il ne correspondait à l'idée que je m'en étais faite. En réalité, il s'agit d'une enquête, d'un grand article sur les rouages économiques de la mafia. Plus que la partie criminelle (qui évidemment occupe tout de même une bonne place dans cet ouvrage), l'auteur s'intéresse au fonctionnement commercial des organisations comme de véritables entreprises.
Il est à mentionner la polémique autour de l'auteur, accusé de plagiat qui aurait compilé plusieurs articles (écrits pas d'autres journalistes moins connus) sur différents thèmes : la place des femmes, l'utilisation des marques de luxe, etc sans citer ses sources malgré les nombreuses références du texte qui laissent penser à un gros travail de recherches. Et en dernière partie, une
étude sulfureuse sur la mafia qui gère notamment le problème des déchets
ménagers ou industriels. Mais d'une façon qui ne correspond pas à celle des sociétés de
recyclage moderne. On enterre tout par ci par là, sans contrôle des autorités sanitaires. De nombreuses sociétés agricoles sont touchées. Les fruits et légumes qui poussent sur ces terres dévastées sont impropres à la consommation. Cette fin porte le coup de grâce. Le dernier chapitre est, littéralement, insupportable.
Il y a aussi ce débat sur le « style mi-réel / mi-fiction » » adopté par
Saviano, une manière d’écrire qui plonge dans le doute par moment sur
la véracité des propos qu’il défend… Ceci dit, il ne faut pas se leurrer sur le fonctionnement du Sud de l'Italie. Si tout n'est pas vérifiable, si les faits sont douteux, la mafia joue justement là-dessus pour perpétuer ses méfaits en toute impunité. La Camorra est propriétaire de la Campanie, de ses habitants, elle a un chiffre
d’affaire inimaginable, négocie avec des états, des armées et les plus
grandes entreprises mondiales. Elle fut la première à s’implanter en
Europe de l’Est et en Chine. Roman de la rédemption ou critique du capitalisme ? La question reste ouverte.
Pour aller plus loin : Je n'ai pas vu le film éponyme adapté de Matteo Garrone qui a remporté le Grand Prix du Festival de Cannes en 2008. Toutefois, la série à succès inspirée du livre, n'a à mon sens pas grand chose à voir avec l'univers du livre. Au programme : action et vendetta. Ceci dit, la plongée dans l'univers napolitain est bien plus emblématique (n'en déplaise au maire) puisque la série est tournée dans ce dialecte. Aussi, je trouve qu'elle vaut le coup ne serait-ce que par ce qu'il s'agit d'une série divertissante mais aussi intelligente.
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