Le ciel par-dessus le toit, Natacha Appanah

Le ciel par-dessus le toit par Appanah


Résumé : D'abord il y a la mère, Eliette devenue Phénix, le personnage le plus déchirant : les passages qui éclairent sur les traumatismes vécues durant son enfance sont décrits de manière brute, crue, à l'image du personnage et de son langage. Elle ne sera jamais capable de passer outre même si la fin suggère une lueur d'espoir pour elle, pour l'amour de ses enfants. Bref, ces traumatismes, comme vous le savez, n'impactent pas seulement la victime mais également ses proches, et ici plus particulièrement, ses enfants.Paloma, la fille aînée, qui a décidé que pour vivre il fallait qu'elle fuit le plus loin possible de cette mère en souffrance, quitte à abandonner son petit frère et à être torturée par les affres de la culpabilité.
Le fils, le frère, Loup, adolescent étrange et décalé, emmuré dans ses détresses. le choc de son incarcération reconstitue le trio, avec peut-être la résilience au bout, peut-être un horizon moins sombre.

Quatrième de couverture : Phénix, mère de famille au passé douloureux, élève seule ses enfants avec froideur et distance. Sa fille Paloma quittera le domicile dès qu’elle le pourra. Loup, le cadet, décide un jour de prendre la voiture pour retrouver sa sœur et provoque un accident qui lui vaut d’être enfermé dans une prison pour enfant. La mère et la fille vont devoir reprendre contact pour libérer Loup.
«Sa mère et sa sœur savent que Loup dort en prison,
même si le mot juste c’est maison d’arrêt mais qu’est-ce que ça peut faire les mots justes quand il y a des barreaux aux fenêtres, une porte en métal avec œilleton et toutes ces choses qui ne se trouvent qu’entre les murs. Elles imaginent ce que c’est que de dormir en taule à dix-sept ans mais personne, vraiment, ne peut imaginer les soirs dans ces endroits-là.»
Comme dans le poème de Verlaine auquel le titre fait référence, ce roman griffé de tant d’éclats de noirceur nous transporte pourtant par la grâce de l’écriture de Nathacha Appanah vers une lumière tombée d’un ciel si bleu, si calme, vers cette éternelle douceur qui lie une famille au-delà des drames.

 Mon avis : C'est assez court et ça se lit facilement. Il a le mérite de retranscrire avec justesse des émotions très différentes et de transmettre au lecteur cette émotion. La noirceur de la situation décrite de cette famille dysfonctionnelle côtoie l'écriture poétique de l 'auteur. Le titre annonce la couleur dès le début puisqu'il fait référence à un poème de Paul Verlaine. Il laisse également entendre que tout n'est pas pour cette famille, qu'il existe une lueur d'espoir.

« Il était une fois » commence ce roman, comme un conte atemporel et universel sur la famille, la filiation, l'hérédité de la transmission des traumatismes. « Il était une fois » le conclut de façon puissance et vibrante comme un hymne à la vie, aux possibles. Ne vous méprenez pas, l'écriture est loin d'être larmoyante, c'est juste bien écrit. Peut-être que la temporalité pourra vous déstabiliser : entre flashbacks et ellipses, néanmoins, le tout reste compréhensible et cohérent vis à vis du point de vue interne utilisé pour comprendre les points de vue des différents personnages. Le récit s'ouvre par un banal fait divers : Loup, sans permis, provoque un accident en roulant à contre-sens et sans permis en voulant retrouver sa soeur, qu'il n'a pas vu depuis dix ans. Cet événement, au symbolisme explicite, le conduit en prison et plonge sa famille dans l’inquiétude. Le récit trouve son origine dans la violence de ce moment qui bouscule soudain les équilibres du présent et les silences du passé. Pourtant, cet événement est à peine mentionné, sans longue description et la violence de celui-ci n'est même pas évoquée. L’arrivée de Loup à la prison pour mineurs est marquée elle aussi par une forme de douceur inattendue, où la porte d’entrée, peinte en bleu, lui rappelle les couleurs des Cyclades. Le lecteur traverse cette épreuve à travers le regard du jeune homme, un peu distant, comme s'il était toujours sous le choc de l'accident ou comme s'il vivait une véritable aventure avec la curiosité de l'observateur. La violence de la prison pour mineurs ici est donc adoucie par ce personnage qui est présenté avec un trouble de l'attention.

Si on veut aller plus loin, on pourrait étudier dans ce conte, la place du Loup qui finalement se révèle aussi doux qu'un agneau, la colombe Paloma qui s'envole du nid et enfant la renaissance du Phénix à plusieurs moments du récit. Vous l'aurez compris, il y a beaucoup à dire sur ces 125 pages que je vous recommande.

Commentaires

Articles les plus consultés