La muraille de Chine et autres nouvelles

La Muraille de Chine et autres récits par Kafka 

Quatrième de couverture : En cinq ans, on pouvait construire environ cinq cents mètres ; après quoi, il est vrai, les chefs étaient en général trop épuisés et ils avaient perdu toute confiance en eux-mêmes, toute foi dans la Contruction et les choses du monde. Alors qu'ils étaient encore dans l'exaltation des festivités célébrant la jonction de mille mètres de Muraille, on les envoyait au loin, très loin. Au cours de ce voyage, ils voyaient surgir dans le paysage des pans achevés de la Muraille, ils passaient devant les quartiers généraux des grands chefs qui les décoraient ; à leurs oreilles retentissaient les clameurs des nouvelles armées de travailleurs déferlant des profondeurs du pays.

Mon avis : J'ai hésité à vous parler de ce recueil de nouvelles qui semble un peu décousu. Mais en vérité, elles reflètent toutes le style bien reconnaissable de Kafka. La plupart des textes sont assez courts, à quelques exceptions près, et bien évidemment, certains sont inachevés. Pour ceux qui ne le sauraient pas, éternel insatisfait, Kafka n'arrivait pas à les terminer, en était insatisfait au point de demander à son ami Max Brod de détruire tous ses manuscrits après sa mort, ce que ce dernier ne fit pas, heureusement.  

Le Terrier, écrit peu de mois avant sa disparition met en scène un animal ou plutôt une créature. Les réflexions humaines paranoïaques de cette bête ajoutent à la dimension dramatique de l'histoire. « Il », le narrateur est obnubilé par son terrier ; à la fois refuge, piège, idéal et cauchemar. La solitude dressée en étendard, en revendication, résonne à la fin du récit (qui est inachevé) comme un glissement sans fond vers la folie. Cette bête qui se sent à l'abri dans son terrier, amoureusement construit, entretenu, élaboré avec un luxe qui confère à la maniaquerie ; est soudainement agressée par un bruit étranger. Redoutant le monde extérieur peuplé d'ennemis invisibles, la créature voit peu à peu l'effondrement de son sanctuaire ; car le bruit vient de l'intérieur du terrier et impossible d'en trouver l'origine. La paranoïa étant de plus en plus prégnante, notre bête en vient à considérer cette « place forte » qu'est son refuge en objet d'hostilité. Il s'agit presque d'une métaphore de la fin toute proche de Kafka et de son impuissance. 

Les recherches d'un chien sont les réflexions d'un vieux chien sur sa vie passée, sur la vie de ses congénères ; s'adressant à des lecteurs canins, il serait un peu facile de trouver cela presque ridicule si le questionnement de ce vieil animal ne finissait par nous émouvoir.
Dans ce recueil des bribes de nouvelles, à peine une page, beaucoup d'inachevé.
La peur des autres, le jugement des autres est un leitmotiv comme dans Le voisin, un homme persécuté par deux billes blanches. Toujours la bizarrerie, le décalage, l'appréhension du monde extérieur et de son propre monde. Je crois que l'on peut dire que tous ces récits sont des énigmes dont la signification profonde nous échappe le plus souvent, on se perd en conjectures, mais c'est cela justement qui en fait l'intérêt, stimule notre réflexion et notre imagination, une incompréhension du lecteur comme des personnages.... 

Lu dans le cadre du challenge : Les classiques, c'est fantastique

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