La marquise de Sade, Mireille Calmel

 La Marquise de Sade par Calmel 

Résumé : Pour avoir leurs entrées à la cour de Louis XV, les Montreuil offrent leur fille et une belle dot à une famille prestigieuse, les Sade. C'est ainsi que Renée Pélagie de Montreuil devient en 1763 l'épouse de Donatien Alphonse François, le futur 'Marquis de Sade'.
Elle s'éprend de son mari, prend plaisir à échanger avec lui sur les arts et les lettres, mais s'interdit de se donner à lui corps et âme : "Une épouse ne jouit pas. Elle procrée. Dans l'obscurité, chemise remontée sur le haut des cuisses à peine entrouvertes et sur le dos."
Mais Donatien a beaucoup d'appétit, c'est bien connu, il dévore avec d'autres ce que sa légitime lui concède avec parcimonie. Des lettres anonymes informent la jeune femme de ces ébats extra-conjugaux et l'incitent à y assister discrètement. Ses sens s'éveillent, attisés par la correspondance troublante avec l'inconnu.

Quatrième de couverture : En cet été 1763, Renée Pélagie de Montreuil est depuis quelques mois la Marquise de Sade. Une Marquise très éprise mais très chaste qui reçoit une mystérieuse lettre l'informant de l'inconduite de son époux et l'invitant à assister à ses frasques. Un premier billet anonyme qui ouvre à la belle Marquise des horizons délicieusement interdits.

Mon avis : Mireille Calmel ne nous avait pas habitués à un récit aussi sulfureux. Il s'agit d'un mélange de 50 nuances de Grey (que je n'ai pas lu) et des Liaisons Dangereuses. Entre récit épistolaire et hommage appuyé au personnage de Valmont qui fait une brève apparition dans le roman, le marquis de Sade semble en être largement inspiré. La majorité du roman est donc écrite sous forme épistolaire, presque un journal intime. C'est donc à une éducation et une libération du désir que nous assistons, assortie de quelques scènes plus osées perpétrées par un Marquis en devenir. Un retour aux sources du BDSM en quelques sortes. Tout le roman étant vu par les yeux et la plume de la prude Marquise, un voile de pudeur recouvre les scènes les plus érotiques. Comme le souligne également l'auteure, ce sont les mots de l'époque qui sont utilisés dans le roman, et quoi de plus pudique que l'évocation d'un jardin et d'un bouton de rose pour parler de l'intimité féminine !

Ceci dit, le roman est très court et un peu bâclé à mon sens. Même si Sade est acteur dans cette intrigue, le ton est plus érotique que pornographique, vantant notamment les délices douloureux/la douleur délicieuse de l'attente. Aucune des perversions criminelles qu'on lui connaît (pédophilie, inceste, viol, zoophilie, nécrophilie) n'est décrite ici, on assiste uniquement à des échanges variés et torrides entre adultes consentants. A travers le portrait de Renée Pélagie de Montreuil, épouse de Sade, c'est une image inattendue et pleine de nuances du célèbre "marquis" que dessine l'auteure. La relation amoureuse complexe entre Pélagie et Donatien est remarquablement mise en scène, de même que l'ambiance de l'époque dans l'aristocratie. Le roman ne couvre que les 4 premiers mois de leur mariage, tout juste le temps de faire connaissance avec celui qui donnera plus tard son nom au sadisme. Mais on voit se profiler son avenir, on en apprend les raisons et on aurait aimé que ce soit davantage développé.
Enfin, dans ce court roman, sous-titré « Chroniques libertines« , le libertinage est décliné dans tous les sens du terme. La liberté des mœurs côtoie la liberté de l’esprit. On y cite Voltaire, Diderot, Rousseau, ces chefs de fil des Lumières. Pélagie apprend à aimer librement autant qu’elle cultive son esprit à ce nouveau courant de pensée que sont les Lumières.  Mais les derniers chapitres montrent à quel point se détacher de plusieurs siècles de croyance religieuse n’a pas été chose aisée même pour quelqu’un comme le Marquis.

La philosophie dans le boudoir

Pour aller plus loin : Il me semblerait judicieux de passer à la vitesse supérieure et d'aller voir les écrits du Marquis lui-même. L'expression d'un athéisme virulent est l'un des thèmes les plus récurrents de ses écrits. Détenu sous tous les régimes politiques (monarchie, république, consulat, empire), il est resté enfermé — sur plusieurs périodes, pour des raisons et dans des conditions fort diverses — pendant vingt-sept ans sur les soixante-quatorze années que dura sa vie.

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