Une bibliothèque idéale, Hermann Hesse
Résumé : Hermann Hesse (1877-1962) n’est pas seulement le célèbre auteur de
Demian, Siddharta, du Loup des Steppes et d’autres chefs-d’œuvre encore
de la littérature allemande. C’était aussi un immense lecteur, un
bibliophile extraordinaire, qui vécut dans le commerce intime d’ouvrages
rares ou bon marché issus de toutes les cultures, de toutes les
époques. Et c’est bien un amoureux des livres que nous découvrons ici au
fil des notes, des lettres, des billets et des articles retrouvés par
son fils après sa mort : quelque trois mille publications dont il n’a
retenu que le dixième et dont la présente traduction offre quelques
extraits.Tout en dressant pour nous le catalogue d’une bibliothèque de
littérature universelle, Hesse nous fait partager ses découvertes, ses
joies et ses amours. Mais il établit aussi le bilan de la situation dans
laquelle se trouvent le lecteur et l’écrivain dans la société moderne.
Loin de céder devant son matérialisme, il assume sa mission, avec toute
la souffrance qu’elle implique : celle d’ouvrir à notre époque le monde
des images, le monde de l’âme et d’exprimer son immortalité. Hesse, qui
se présente à nous comme un « lecteur ensorcelé », rappelle donc à quel
point le livre est une composante essentielle de l’humanité ; il nous
ramène à la réalité profonde de la lecture et de l’écriture, à leur
dimension magique et sacrée.
Mon avis : Le choix du déterminant dans le titre est très important puisque l'auteur ne dresse pas la liste à avoir à tout prix mais une liste parmi d'autres qui pourrait être idéale pour quelqu'un comme lui mais qui ne serait pas identique à celle du lecteur. C'est donc principalement cette pratique de la lecture qui est discutée, ainsi que celle du travail d'auteur. Dans une bibliothèque de littérature universelle, Hermann Hesse fait
débuter son propos par une introduction tout à fait passionnante et
intéressante sur la culture : selon lui, « elle possède sa propre
rétribution en elle-même : elle accroît la joie de vivre et la confiance
en soi ; elle nous rend plus gais, plus heureux » [p. 17]. L'une des
facettes de cette culture, celle dont il est question dans cet essai,
est la littérature universelle : pour qu'elle remplisse cette fonction
de la culture, il n'est pas tant que question de lire beaucoup que de
lire bien.Tout
en insistant sur le fait que la bibliothèque idéale différera en
fonction de chaque lecteur (c'est la raison pour laquelle il ne faut
selon lui forcer personne à lire tel ou tel chef-d'oeuvre qui ne lui
correspondrait pas : « La violence ou la patience ne nous seront d'aucun
secours pour venir à bout d'une oeuvre que l'on nous a vantée, qui nous
déplaît, nous résiste et nous reste impénétrable. » [p. 21]), Hermann Hesse propose
une série de titres et d'auteurs incontournables d'après lui. J'ai été
assez contente de retrouver quelques noms qui m'étaient connus – par la
lecture ou l'histoire de la littérature – et en ai repéré quelques
autres. Ma mention de l'histoire de la littérature n'est pas anodine ici
: Hesse dit lui-même à l'issue de cet exposé que cette bibliothèque est
davantage celle des manuels que d'un véritable lecteur avec sa
personnalité et ses préférences. Il répare alors cette froide
objectivité en faisant part de sa propre expérience et de ses propres
choix, en assumant tout à fait sa subjectivité. J'ai de loin préféré ce
classement-ci, qui ne correspond pas forcément au mien, mais qui m'a
semblé beaucoup plus vivant et passionné que le précédent. C'est donc
avec plaisir que j'ai retrouvé cette subjectivité et surtout cette envie
de partager sa passion dans le dernier article du recueil, Mes lectures
préférées. Hermann Hesse fait
preuve d'une grande lucidité et d'un ton parfois acerbe pour évoquer le
comportement de certains de ses confrères indignes d'être nommés «
écrivains ». Il souligne également la difficulté de cet état à son
époque (très similaire à la nôtre de ce point de vue, me semble-t-il) de plus en plus industrialisée.
Pour aller plus loin : Il ne vous reste plus qu'à vous attaquer à l'un des volumes ou des thèmes conseillés par l'auteur. Pour ma part, je me tâte depuis quelques temps maintenant à commencer les Mille et Une Nuits en me disant que je n'ai pas le temps. Il est temps que je le prenne.
Commentaires
Enregistrer un commentaire
Veuillez rester poli et courtois